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Droit public social

Le contentieux administratif occupe une place grandissante dans le droit social. Les contentieux des salariés protégés ou des Plans de sauvegarde de l'emploi (PSE) obéissent à des spécificités procédurales et à une grille de lecture propre au juge administratif. L'objet de ce blog sera de donner une vision de praticien du contentieux administratif sur ces questions sensibles et à hauts enjeux. * * * * * * * * * * * * * * * * * * Maître PHILIPPOT est avocat au Barreau de Paris. Diplômé de l'Université d'Aix-Marseille où il a obtenu un DEA de Droit public, spécialisé en collectivités territoriales et un DESS de Droit de l'urbanisme, de la construction et de l'aménagement, il a prêté serment en 2003 au Barreau de Marseille et a rejoint, en 2007, le Barreau de Paris, aprés avoir pratiqué à Montpellier et à Lyon. Depuis 2003, il a développé une expertise juridique en matière de droit public et en particulier en matière de Contentieux administratifs. Me PHILIPPOT ECHO Avocats 14, avenue Alphand 75116 PARIS Tel : 01 42 84 24 56/ bb: 07.62.57.17.75 Fax : 01 45 49 32 21 www.echoavocats.com Metro: Porte Maillot (ligne 1) Email: rphilippot@echoavocats.com Demande de rendez-vous : 07.62.57.17.75 ou bien par demande adressée par email. Réponse sous 24

Salariés protégés et Commission paritaire professionnelle

Le conseil d'Etat dans un arrêt du 4 mai 2016 (mentionné aux tables) énonce que

Considérant, d'une part, que l'article L. 132-4 du code du travail, en vigueur à la date de la décision en litige, devenu l'article L. 2251-1 du même code, dispose que les conventions et accords collectifs de travail : " (...) ne peuvent déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public " ; que, d'autre part, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 132-30 du même code, en vigueur à la date de la décision en litige, devenu l'article L. 2234-3, les accords instituant des commissions paritaires professionnelles au plan local, départemental ou régional " déterminent (...) les modalités de protection contre le licenciement des salariés membres de ces commissions et les conditions dans lesquelles ils bénéficient de la protection prévue par les dispositions de l'article L. 412-18 " ; qu'il résulte de ces dernières dispositions, éclairées par les travaux parlementaires ayant précédé l'adoption de la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social dont elles sont issues, que le législateur a entendu accorder aux salariés membres des commissions paritaires professionnelles créées par accord collectif la protection prévue par l'ancien article L. 412-18 du code du travail, devenu l'article L. 2411-3 du même code, pour les délégués syndicaux en cas de licenciement ; que ces dispositions, qui sont d'ordre public en raison de leur objet, s'imposaient, en vertu des principes généraux du droit du travail rappelés par les dispositions de l'ancien article L. 132-4, à toutes les commissions paritaires professionnelles créées par accord collectif, y compris celles créées par des accords antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi du 4 mai 2004 ;

Conseil d'État

N° 380954
ECLI:FR:XX:2016:380954.20160504
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
4ème et 5ème chambres réunies
Mme Pauline Pannier, rapporteur
Mme Maud Vialettes, rapporteur public
SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY ; SCP MATUCHANSKY, VEXLIARD, POUPOT, avocats


lecture du mercredi 4 mai 2016

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt du 14 septembre 2012, la cour d'appel de Lyon, saisie d'un litige relatif au licenciement de Mme D...A...par M. C...B..., architecte, a sursis a statuer et invité les parties à saisir le juge administratif de la question de la légalité de la décision du 10 décembre 2007 de l'inspecteur du travail de la 8ème section de l'Isère se déclarant incompétent pour autoriser le licenciement, en qualité de salariée protégée, de MmeA....

Mme A...et le syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT, agissant en exécution de cet arrêt, ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'apprécier la légalité de cette décision. Par un jugement nos 1304393,1304397 du 4 avril 2014, le tribunal administratif a déclaré que la décision était entachée d'illégalité.

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 juin et 5 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...et l'Union nationale des syndicats français d'architectes demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de déclarer que la décision de l'inspecteur du travail n'est pas entachée d'illégalité ;

3°) de mettre à la charge de Mme A...et du syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 ;
- la convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003, étendue par l'arrêté du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité du 6 janvier 2004 ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Pauline Pannier, auditeur,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat de M. B...et de l'Union nationale des syndicats français d'architectes et à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de Mme A...et du syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 avril 2016, présentée par M. B...;




1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., architecte, a demandé à l'administration l'autorisation de licencier sa salariée, MmeA..., qui était mandatée par le syndicat CFDT pour siéger à la commission paritaire régionale Rhône-Alpes des entreprises d'architecture ; que l'inspecteur du travail de la 8ème section de l'Isère s'est, le 10 décembre 2007, déclaré incompétent pour statuer sur la demande au motif que ce mandat ne conférait pas de statut protecteur à Mme A...; que, par un arrêt du 14 septembre 2012, la cour d'appel de Lyon, saisie d'un litige relatif au licenciement de MmeA..., a invité les parties à saisir le tribunal administratif de la question de la légalité de la décision de l'inspecteur du travail ; qu'à la demande de Mme A...et du syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT, le tribunal administratif de Grenoble a, par un jugement du 4 avril 2014, déclaré cette décision illégale ; que M. B...et l'Union nationale des syndicats français d'architectes relèvent appel de ce jugement ;

2. Considérant que l'Union nationale des syndicats français d'architectes n'était pas partie à l'instance devant le juge judiciaire ; qu'ainsi, bien qu'elle ait été intervenante à l'instance devant le tribunal administratif de Grenoble, elle n'a pas qualité pour faire appel de ce jugement ; que la requête d'appel est, par suite, irrecevable en tant qu'elle émane de l'Union nationale des syndicats français d'architectes ; que, toutefois, à la suite de la communication du moyen d'ordre public tiré de cette fin de non-recevoir, l'Union nationale des syndicats français d'architectes déclare intervenir au soutien des mêmes conclusions ; qu'elle justifie, par son objet statutaire, d'un intérêt de nature à rendre cette intervention recevable ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article XV.3, XV.3.1 de la convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003, étendue par un arrêté du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité du 6 janvier 2004 : " Les commissions paritaires régionales (CPR) sont chargées dans le cadre de chaque région administrative des missions suivantes : / - suivi de l'application de la CCN en relais de la commission paritaire nationale de la négociation collective ; / - analyse de l'emploi et de la formation en relais de la commission paritaire nationale de l'emploi et de la formation ; / - négociation de la valeur du point ; / - conciliation de différends individuels ou collectifs sur saisine d'employeurs ou de salariés ; / - avis sur licenciement de salarié protégé. / Les commissions paritaires régionales sont composées de membres mandatés par les organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives au plan national (...) " ; qu'aux termes de son article II.8 : " Les délégués syndicaux et représentants du personnel bénéficient de la protection accordée par les dispositions du code du travail. / Le licenciement d'un salarié, investi de mandats syndicaux ou électifs, est soumis à l'autorisation de l'inspection du travail et après avis de la commission paritaire régionale ; celle-ci se prononce dans les 6 semaines suivant sa saisine " ;

4. Considérant qu'il résulte clairement des stipulations de l'article II.8 de la convention collective nationale des entreprises d'architecture citées ci-dessus qu'elles ne confèrent pas aux salariés qui sont seulement mandatés par des organisations syndicales pour siéger dans les commissions paritaires régionales le bénéfice du régime protecteur prévu par le code du travail en cas de licenciement, lequel n'est octroyé par ces stipulations qu'aux seuls délégués syndicaux et représentants élus du personnel ; que, par suite, M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur les termes de l'article II.8 de la convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003 pour juger qu'une autorisation administrative était requise pour licencier Mme A...et que, en conséquence, la décision du 10 décembre 2007 par laquelle l'inspecteur du travail s'est déclaré incompétent était entachée d'illégalité ;

5. Considérant qu'il appartient toutefois au Conseil d'Etat, saisi du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par Mme A...et le syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT devant le tribunal administratif ;

6. Considérant, d'une part, que l'article L. 132-4 du code du travail, en vigueur à la date de la décision en litige, devenu l'article L. 2251-1 du même code, dispose que les conventions et accords collectifs de travail : " (...) ne peuvent déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public " ; que, d'autre part, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 132-30 du même code, en vigueur à la date de la décision en litige, devenu l'article L. 2234-3, les accords instituant des commissions paritaires professionnelles au plan local, départemental ou régional " déterminent (...) les modalités de protection contre le licenciement des salariés membres de ces commissions et les conditions dans lesquelles ils bénéficient de la protection prévue par les dispositions de l'article L. 412-18 " ; qu'il résulte de ces dernières dispositions, éclairées par les travaux parlementaires ayant précédé l'adoption de la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social dont elles sont issues, que le législateur a entendu accorder aux salariés membres des commissions paritaires professionnelles créées par accord collectif la protection prévue par l'ancien article L. 412-18 du code du travail, devenu l'article L. 2411-3 du même code, pour les délégués syndicaux en cas de licenciement ; que ces dispositions, qui sont d'ordre public en raison de leur objet, s'imposaient, en vertu des principes généraux du droit du travail rappelés par les dispositions de l'ancien article L. 132-4, à toutes les commissions paritaires professionnelles créées par accord collectif, y compris celles créées par des accords antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi du 4 mai 2004 ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, Mme A...ayant été mandatée par le syndicat CFDT pour siéger à la commission paritaire régionale des entreprises d'architecture, son licenciement était soumis à l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail ; qu'ainsi, M. B...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Grenoble a déclaré illégale la décision du 10 décembre 2007 de l'inspecteur du travail de la 8ème section de l'Isère ;

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit, à ce titre, mise à la charge de Mme A...et du syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance ; que ces dispositions font également obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Union nationale des syndicats français d'architectes, qui n'a pas la qualité de partie dans la présente instance ; qu'enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. B...la somme demandée par Mme A... et le syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT au titre des mêmes dispositions ;



D E C I D E :
--------------

Article 1er : L'intervention de l'Union nationale des syndicats français d'architectes est admise.

Article 2 : La requête de M. B...et de l'Union nationale des syndicats français d'architectes est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A...et le syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C...B..., à l'Union nationale des syndicats français d'architectes, à Mme D...A..., au syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

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